Mon père Claude NAUDIN est né à Andrésy
(78) le 21 novembre 1915. Il fréquente l Ecole Primaire
d Andrésy et y obtient son Certificat d Etudes en
1930. Il travaille alors avec son père Edouard dans l entreprise
familiale, comme peintre en bâtiment, jusqu à son
Service Militaire (1936 1938).
A peine libéré de ses obligations
militaires il est mobilisé (22
Août 1939) sur la ligne Maginot. En novembre 1939, il obtient une permission
spéciale pour épouser Denise FRANCHINO puis rejoint son unité le
1er Décembre 1939. Il ne reverra sa femme que deux fois avant d être
fait prisonnier par les Allemands en juin 1940 dans la forêt de St. Dié.
Il suit alors les colonnes de prisonniers de guerre de camp en camp de Nuremberg à Weinsberg
(Vurtemberg) où il est contraint de travailler à l usine à gaz
de ville, au chargement des fours à charbon. Il y reste jusqu à sa
libération par les troupes Américaines le 13 Avril 1945. Il est
démobilisé le 26 mai 1945 à Paris.
Il reste marqué à vie par cette expérience militaire traumatisante
qui influe sur son caractère et le rend difficile à vivre pour
ses proches. Il commence alors à peindre plusieurs tableaux d instinct
et démontre un réel talent pour le dessin et la couleur. Délaissant
dès son retour d Allemagne, l entreprise de peinture en bâtiment
de son père, il rejoint son beau-père Auguste FRANCHINO, avec qui
il apprend le métier d électricien.
En 1947, il rencontre à Andrésy Fin d Oise, le peintre-graveur
Raymond FONTANET dit « RENEFER », avec qui il se lie d amitié et
qui devient très rapidement son Maître. Les deux hommes s estiment
et leur amitié augmentera au fil des années. Ils peignent ensemble
pendant dix ans, jusqu à la mort de Renefer en 1957.
Parallèlement à sa passion pour la peinture, il élève
ses deux enfants, Dominique(1946) et Francine (1951) et leur donne une éducation
et une ouverture sur le monde et ses valeurs, qui prouvent son humanisme et sa
perception aiguë du monde.
Vase
aux pavots (1955)
Artistiquement très influencé et guidé par
Renefer, il fréquente pendant cette période divers salons
et expositions, comme l Académie de Conflans Sainte Honorine
(dont Renefer est président) et surtout le Salon des Artistes Indépendants à Paris
(dont Renefer est membre du bureau).
Vue depuis le Moussel à Andrésy
(1956)
Il apprend également de Renefer,
l art difficile de la xilogravure (gravure sur bois), avec un talent
et une habileté qui en disent long sur sa maîtrise artistique
et artisanale.
Les gouges de gravure
L'église d'Andrésy (sa première gravure sur
bois)
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La carte à gratter d'après nature |
Le bois gravé en symétrique
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Le dernier tirage n°100
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Après la disparition de son ami, il commence avec bonheur le
lavis à l encre
de Chine et l aquarelle, tout en continuant
la peinture à l huile
dès que ses obligations professionnelles et familiales lui laissent
un peu de temps.
Lavis : en bas de la côte du cimetière d'Andrésy
aquarelles
: fin d'Oise inondé
Vue sur le vieil Andrésy
Vue vers
l'île
Il n a jamais cherché à se lancer professionnellement dans
la peinture, ni à vendre quoi que ce soit de ses Suvres, préférant
donner ses créations à ses amis ou aux gens qu il a en
estime, considérant que l art doit absolument se dégager
des contraintes mercantiles, pour accéder à la pureté et
au désintéressement qui, pour lui, mènent à l accomplissement
et à la liberté de l expression artistique. C est
cet état d esprit, très respectable au demeurant, qui fait
que toute sa vie d artiste et son Suvre restent méconnues
du public et qu il ne se met jamais en valeur dans des galeries d art
ou des expositions / ventes. Il préfère participer à des
manifestations artistiques avec ses amis, mais refuse toujours d en
tirer profit.
A
la fin des années 50, il peint la Bretagne Sud à Doêlan
et alentours où il rencontre un graveur Allemand de Berlin Ouest : M.
VENSK, qui émigre par la suite aux Etats-Unis d Amérique
et M. COURTIN (peintre de Nogent le Rotrou) avec qui il aime partager de bons
moments artistiques, et la bonne chère de l auberge Le Pennec
de Doêlan-sur-Mer.
Le
port de Doêlan sur mer en 1962
En 1969, Denise, sa femme demande le divorce, lassée par son caractère
difficile et son intérêt trop envahissant à son goût
pour son art. Assez ébranlé par cette séparation dont
il ne veut pas, Claude NAUDIN reprend l ancien appartement de ses beaux
parents, près de l église d Andrésy et y installe
son atelier de peintre, qu il occupe jusqu à sa mort.
A la fin des années 60, il découvre les Causses, cette région
qu il trouvait poignante et austère et dont il ramène lavis,
aquarelles et peintures à son goût.
En 1972, ses obligations professionnelles le conduisent au Broc, au dessus
de Nice où il se prend d enthousiasme pour la lumière et
les ciels du Midi ; contraste étonnant avec les gris délicats
de l Ile de France et les ciels tourmentés de Bretagne. Pourtant,
il s adapte très facilement à cette nouvelle palette de
tons plus chauds et y excelle très rapidement, sachant d emblée,
restituer sur ses toiles la densité de lumière de cette attachante
région et les contrastes forts qu elle engendre. Il y reste deux
mois en deux voyages et revient à Andrésy où il prend
sa retraite d électricien en 1980. Eze (1972)
A partir de 1981, il collabore régulièrement aux séances
d arts graphiques organisées à l atelier de l APAS,
rue Saint Charles à Paris, sous la direction de M. VERDEILLE, qui tente
de le pousser vers l art abstrait. Il n est que peu attiré par
cette forme d expression, qu il aime bien commenter avec ses amis
peintres, mais qu il n a pas de plaisir à pratiquer.
Toute
sa vie, il affiche une nette tendance figurative qui le classe dans le post-impressionnisme,
et oriente beaucoup son Suvre vers le paysage pris « sur le motif » en
privilégiant les petits formats avec lesquels il peut restituer l authenticité d un
moment fugace ou d un effet rencontré au hasard et traduit sur
son support en quelques minutes.
Pendant les années 80, il consacre son temps à son art, à ses
enfants et à sa petite fille. De l avis unanime de ses proches,
il est à ce moment de sa vie et ce jusqu à sa mort, un
homme d une incroyable générosité, toujours à l écoute
des autres et ne ménageant pas sa peine pour simplement faire plaisir
aux siens et à ses amis. Ses fameuses pâtisseries sont délicieusement
entrées dans la mémoire gustative de bien des personnes et pour
très longtemps !
Prayssac
(Lot) en 1979
Au début des années 90, Claude aime aller visiter son frère
René une fois l an à Prayssac (46), d où il
ramène quelques carnets de croquis bien remplis et plusieurs belles
peintures à l huile.
L'atelier de l'APAS en 1981
En 1998 , l atelier parisien de l APAS ferme définitivement.
Il entretient alors des rapports amicaux privilégiés avec ses
anciens membres et surtout avec Claude BELLANGER, Sarah HERNANDEZ et Sabine
SZUMIGAJ. Ces deux dernières deviennent ses élèves et
fréquentent régulièrement son atelier d Andrésy,
afin de peindre avec lui et de profiter de ses conseils avisés.
Fin 2004, Marie-Gabrielle THIERRY, jeune artiste peintre établie à Andrésy
le contacte pour créer l Association Renefer, et sortir de l oubli
le vieux maître dont l Suvre sommeille depuis 1957.
Les années 2005 et 2006 lui apportent la satisfaction de voir son ami
Renefer reconnu comme un des peintres majeurs de la région et un témoin
de la Grande Guerre (son Suvre dessinée et gravée sur ce
sujet, fait actuellement autorité).
Le 17 Avril 2007, très affaibli par une insuffisance respiratoire chronique,
Claude NAUDIN s éteint paisiblement à Poissy, à l age
respectable de 91 ans, entouré de l affection de sa famille et
de ses amis. Peu de temps auparavant, il disait à sa belle-fille Jacqueline
DELAVAUX : « Tout compte fait, ma vie, malgré toutes les épreuves
qui l ont ponctuée, n a pas été si mauvaise
que cela ; j y ai acquis un savoir et une expérience humaine qui
valaient la peine d être vécus ».
Biographie
rédigée par son fils Dominique NAUDIN. Page
réalisée avec sa précieuse collaboration
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