Quand Andrésy inspirait nos romanciers...


Dans "Partir avant le jour" (Jeunes années, autobiographie 1), Julien Green relate, entre autres, ses séjours d'enfance à Andrésy. Il y revint le 2 décembre 1989 honorer de sa présence l'inauguration de l'Espace qui porte son nom. Il décède à Paris le 13 août 1998 à l'âge de 97ans et est inhumé en Autriche dans une église.

"Chaque année, à Andrésy, nous louions une villa différente. La première, en 1909, au 32 boulevard de la Seine. C'était une petite maison meublée, surtout de bibelots, me semble-t-il, car il y en avait partout, dans des vitrines, sur des consoles ou pendus aux murs, mais il ne fallait toucher à rien.... On traversait la route, on faisait quelques pas sous une double rangée de tilleuls... Un petit talus descendait jusqu'aux berges de la Seine que je regardais avec émerveillement ".

Julien Green a vu le jour avec le siècle, le 6 septembre 1900 à 10 heures du matin.
Dernier né d'une famille américaine de huit enfants, venu dans son enfance passer des vacances d'été dans notre village, c'est à l'église Saint-Germain d'Andrésy, accompagné de sa bonne, catholique, que ce protestant ira à la messe pour la première fois. Il aurait aimé y être inhumé, mais ce souhait ne pourra pas être exaucé. Son tombeau l'attend ailleurs... dans une chapelle autrichienne.
Académicien depuis 1971, animé par le goût de l'absolu, il continue d'écrire avec passion, discret et solitaire, dans son appartement au salon rouge sang et au couloir plaqué de mille livres, rue Vaneau, face à l'Hôtel Matignon.




Guy de Maupassant a publié une nouvelle, "Le modèle", dans "Le Gaulois" du 17 décembre 1883, puis dans le recueil : Le rosier de Madame Husson.
En voici un extrait :

"...Ils louèrent pour l'été une petite maison à Andrésy. J'étais là, un soir, quand germèrent les premières inquiétudes dans l'esprit de mon ami. Comme il faisait une nuit radieuse, nous voulûmes faire un tour au bord de la rivière. La lune versait dans l'eau frissonnante une pluie de lumière, émiettait ses reflets jaunes dans les remous, dans le courant, dans tout le large fleuve lent et fuyant. Nous allions le long de la rive, un peu grisés par cette vague exaltation que jettent en nous ces soirs de rêve. Nous aurions voulu accomplir des choses surhumaines, aimer des êtres inconnus, délicieusement poétiques. Nous sentions frémir en nous des extases, des désirs, des aspirations étranges. Et nous nous taisions, pénétrés par la sereine et vivante fraîcheur de la nuit charmante, par cette fraîcheur de la lune qui semble traverser le corps, le pénétrer, baigner l'esprit, le parfumer et le tremper de bonheur. Tout à coup Joséphine (elle s'appelle Joséphine) poussa un cri :
- Oh ! as-tu vu le gros poisson qui a sauté là-bas ?
Il répondit sans regarder, sans savoir :
- Oui, ma chérie..."


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vers la page... Maupassant à Andrésy

 


Après une enfance aisée dans une famille bourgeoise de Paris, Marcel Allain commence des études de droit qu'il abandonne bientôt pour le journalisme. Il devient alors secrétaire de Pierre Souvestre, homme de lettres très lancé dans le " parisianisme ".
Ils écrivent, en 1909, leur premier roman " Le Rour ", puis le premier volume de la série " Fantomas ", paru le 15 février 1911. Le 26 février 1914, Pierre Souvestre meurt et Marcel Allain écrira, seul, douze volumes de Fantomas.
Il s'intéresse au cinéma, aux bandes dessinées, aux techniques nouvelles dont l'automobile qui le fascine.
Il épouse, le 27 septembre 1926 Henriette Kistler, la compagne de Pierre Souvestre. En 1939, il emménage à Andrésy dans la villa Eden-Roc, sombre maison en haut de la côte des Tartres où il écrira quatre cents titres.
À la fin de sa vie, il quittait encore Andrésy à l'aube, pour sillonner, dans sa Mercédès, les routes des environs pour des conférences et des signatures. Une congestion cérébrale devait l'emporter le 25 août 1969.


Maurice Leblanc est né le 11 novembre 1864 à Rouen dans une famille bourgeoise puisque le père est armateur. Après des études brillantes au lycée Corneille, le jeune homme, à l'imagination enflammée, admirateur de Flaubert et de Maupassant, se sent habité par la vocation d'écrivain.
Maurice Leblanc est devenu, malgré lui, un très grand auteur populaire. Au meilleur sens du terme : aimé du peuple. Il a mené toute sa vie un combat contre Arsène Lupin, ce flamboyant héros qui le détrônait, mais qui lui fît connaître un succès foudroyant, international. Maurice Leblanc devra donc vivre avec cet Arsène Lupin dont les aventures s'étaleront finalement dans seize romans, trente-sept nouvelles et quatre pièces de théâtre de 1905 à 1939.
Maurice meurt le jeudi 6 novembre 1941, d'une congestion pulmonaire, à l'hôpital Saint-Jean de Perpignan. Il est inhumé dans cette même ville le 8 novembre. Son corps fut exhumé le 11 octobre 1947 et transporté le 14 au cimetière du Sud-Montparnasse, à Paris, où il repose désormais.

Mai ou juin 1874 : Naissance à Blois d'Arsène Raoul Lupin. Il est le fils d' Henriette d'Andrésy (orthographié parfois Andrézy), mariée en dépit de l'indignation de sa famille avec Théophraste Lupin, roturier pauvre comme Job, simple professeur de gymnastique, d'escrime et de boxe. La Cagliostro jettera plus tard (1894) à la face d'Arsène : Ton père, qui exerçait le métier de professeur de boxe et de savate avait la profession plus lucrative d'escroc. Il fut condamné et emprisonné aux Etats-Unis où il mourut. La mort de Théophraste est intervenue à une date inconnue après celle d'Henriette.

Pourquoi Maurice Leblanc a-t-il utilisé le mot Andrésy dans les pseudonymes d'Arsène Lupin ? Il semblerait que la présence à Andrésy, rue de Chanteloup, de son ami romancier et auteur de théâtre Charles Foley soit une explication possible. Celui-ci est enterré dans le vieux cimetière d'Andrésy.

Quelques pseudonymes...
* Comte Bernard d'Andrésy : Lupin usurpe cette identité en 1899 d'un cousin décédé en Macédoine. (La Comtesse de Cagliostro, Arsène Lupin gentleman-cambrioleur, Les confidences d'Arsène Lupin, La Demoiselle aux yeux verts)

* Vicomte Raoul d'Andrésy : "d'Andrésy" est le nom de famille de la mère de Lupin. Il a porté ce nom jusqu'à l'âge de six ans. (La Comtesse de Cagliostro, Arsène Lupin gentleman-cambrioleur)

Lien vers le clos Arsène Lupin d'Étretat
Un site anglophone très complet sur Arsène Lupin, Fantomas et autres héros de romans ou BD


Paul FORT, poète français (Reims 1872 - Montlhéry 1960)
En 1897, paraît au Mercure de France, le premier volume de ses Ballades françaises. S'inspirant de l'histoire de la France, de ses héros, de ses légendes, et reprenant les thèmes éternels de la poésie, Paul Fort a trouvé un ton et une forme (la strophe où la prose se mêle aux vers sans distinction typographique) qu'il exploite avec une émouvante continuité dans cinquante-quatre volumes.
Certains poèmes sont devenus célèbres à juste titre, telle La Ronde autour du monde. Son style imagé, souvent familier, se prête bien à la chanson (Le Petit Cheval dans le mauvais temps, par exemple, interprété par Brassens).
En 1905, il crée la revue Vers et Prose qu'il dirige avec Paul VALÉRY : des oeuvres des écrivains les plus importants de l'époque (Laforgue, Jarry, Apollinaire, Carco, Gide, Claudel, etc.) y paraîtront jusqu'en 1914. Il contribue à "lancer" Montparnasse et reçoit le titre de Prince des Poètes en 1912.

LES NOCES DU FLEUVE ET DE LA RIVIÈRE

Ici, devant Fin-d'Oise, Maurecourt, Andrésy, Conflans-Sainte-Honorine - doux bruit font ces noms-là ! volée de cloches pour un mariage, dirait-on pas ?... ô poésie, ô poésie, ô poésie !...

Ici, sous les yeux bleus de ces quatre villages, on voit la Seine en fleurs s'unir à la belle Oise. Bien. Montez sur un pont suspendu et berceur. Embrassez votre amie et regardez ailleurs.

L'Oise est une rivière et la Seine est un fleuve, je l'ai de mes yeux vu ; d'autre part j'ai la preuve que pour aller ensemble courir tant de pelouses, la Seine offre son bras à sa trop jeune épouse.

0 noces vaporeuses que j'ai vues de ce pont suspendu et berceur, toute une heure amoureuse, vous me parûtes bien de ces noces heureuses où sous un même voile le couple se confond,

Le voile de la mariée, ohé ! Bien mieux encore - si l'image m'entraîne je n'en ai pas fini - je les vis sous les palmes de grands peupliers d'or, courir et s'embrasser tels Paul et Virginie.

Quoi ! Paul et Virginie mariés ? Oui. L'un portait une casquette ornée d'une fin drapeau français (tel m'apparut, du moins, ce chaland reposé), l'autre un collier de barques scintillant de rosée.

Qu'ils étaient purs !... Sans doute, avant leur doux pourchas, l'Oise eut quelque amourette, la Seine eut des faiblesses. Mes bons amis, la chose ne me regarde pas, qui ne saurait d'ailleurs troubler leur allégresse.

La crécelle d'un gouvernail tourne là-bas. 0 le joli joli joujou pour l'enfant qui viendra ! En tout bien tout honneur, à son heure il viendra. On le nommera l'Eure et des choux il naîtra.

Tout danse autour de vous la danse du mariage, Seine, beau mâle et vous petite oie, petite Oise, les rives, les coteaux, les vignes et cætera, dans les vapeurs tout danse et ma belle à mon bras.

Taratata ! Voici qu'au son de la trompette, à sauter dans les barques une noce s'apprête. Laissez-moi naviguer tous ces joyeux pantins. Mes beaux époux, il faut courir votre destin.

0 joie ! il faut courir ! - La mer est votre sort. - Il faut courir, hélas ? - Et la mer c'est la mort. - Triste à songer. - Mais non. Par un bout vous mourez... mais à l'autre, déjà, la noce est préparée. "

Et je voudrais savoir comment - époux fidèles - dans la foule des fleuves qui se perdent au ciel, vous pouvez retrouver vos gouttes bleues et blondes pour vous aller cacher sous la terre profonde.

En surgir et vous joindre au plus beau lieu du monde, - ici, devant Fin-d'Oise, Maurecourt, Andrésy, Conflans-Sainte-Honorine : doux bruit font ces noms-là ! branle de cloches pour un hymen, dirait-on pas ?

0 poésie ! ô poésie ! ô poésie !

Paul Fort

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